L'Intelligence collective : plus forte que les IA ?
Ses 4 ingrédients pour l'utiliser
Vers une IAcratie ?
Chaque jour nous pouvons constater les performances des IA (Intelligences Artificielles), de nos GPS à ChatGPT (qui écrit en quelques secondes un magnifique poème ou un rapport de 50 pages), à Midjourney qui crée des œuvres graphiques.
Elle excelle dans l’analyse de données et la prise de décisions, suscitant des interrogations sur son rôle croissant dans nos vies personnelles, les entreprises et nos démocraties.
L’Estonie par exemple, arguant de son objectivité, développe une intelligence artificielle qui arbitrera de façon autonome des affaires de délits mineurs. » Source
Alors, nos cerveaux sont-ils obsolètes ?
Allons-nous vers une IAcratie, où les décisions sont prises par les IA ?
Oui l’IA est utile et surclasse l’intelligence humaine dans un nombre important et croissant de domaines.
Mais derrière cette affirmation martelée à longueur de journée, se cachent 3 énormes biais….
1. La créativité de l'esprit humain est unique
Illustration générée en quelques secondes par l’IA Midjourney
Prenons cette illustration que Midjourney a créée sur mes instructions pour en illustrer l’article.
Oui, car elle est unique.
Non, car elle n’est inspirée que des images qui ont servi à entrainer Midjourney.
Là où l’esprit humain est capable d’une réelle innovation.
2. L'intelligence humaine est incroyablement économe en énergie
Dans les tâches d’intelligence artificielle, le montant de calcul n’est pas si énorme que ça.
Une énorme partie de l’énergie est consacrée à déplacer les informations entre les organes de calcul et de mémoire.
Les neurones ont un fonctionnement complètement différent vu qu’ils ne séparent pas calculs et mémoire.
Résultat : L’IA Alpha Go qui a battu le champion du monde consomme 150 000 watts, là où le cerveau humain consomme… 20 watts.
Source
Nous sommes chacun·e une merveille de la nature qui consomme des milliers de fois moins d’énergie qu’une IA à tâche équivalente 😉.
Cette consommation des IA n’est pas sans susciter d’inquiétudes car elle pourrait à court terme dépasser celle d’un pays entier comme l’Irlande !
Source
3. L'intelligence collective est incroyablement supérieure à l'intelligence d'un humain pris individuellement !
C’est ce que nous explique Emile Servan-Schreiber, ancien ingénieur en intelligence artificielle et expert en intelligence collective, dans son livre « Supercollectif » et dans le podcast « Les intelligences collectives » (septembre 2023), c’est que, pour obtenir de l’intelligence collective, il ne suffit pas de rassembler des humains.
Vous avez probablement pu faire cette constatation par vous-même…
Il nous livre les 4 ingrédients de l’intelligence collective, issus du travail de Surowiecki :
1. Une diversité de sources d’informations proches du terrain
2. Un climat propice à l’indépendance d’esprit (absence de pression sociale, hiérarchique,…)
3. Une diversité d’opinions
4. Une méthode capable extraire l’opinion collective : (développée dans le dernier paragraphe)
Avec le projet Hypermind, Emile Servan-Schreiber utilise sa méthode pour résoudre l’un des problèmes les plus complexes : prédire l’avenir.
« Qui va être élu à la présidentielle ? »
« La Chine va-t-elle tenter d’envahir Taïwan d’ici 5 ans ? »
« Quand l’inflation va-t-elle repasser sous la barre des 2% ? »
A un coût économique et énergétique infiniment inférieur à l’IA, uniquement avec l’intelligence collective de citoyens lambda, il arrive à de meilleurs résultats que les IA (et que les meilleurs experts).
Utiliser l'intelligence collective dans votre organisation au quotidien
Premier pas, démonter le mythe tenace que l’intelligence collective ne se crée qu’en réunion.
Oui, c’est une manière valable !
Mais chronophage et limitée en nombre de personnes.
Voire médiocre si l’influence de certaines personnes nuit à l’indépendance d’esprit dans le groupe.
Deuxième mythe : l’intelligence collective requiert un consensus.
Les premières étapes d’échanges de la recherche d’un consensus (ou d’un consentement) génèrent une forte intelligence collective, mais en cherchant à converger par la suite, peuvent se mettre en place une pression sociale, ou des jeux de pouvoirs néfastes à la diversité d’opinions.
Voir l’article « Avantages et limites du consensus et du consentement »
Des alternatives pour extraire l’intelligence collective d’un groupe
Au delà des systèmes complexes comme les systèmes prédictifs d’Emile Servan-Schreiber, ou de procédure (comme Wikipedia), vous pouvez facilement utiliser :
– Les votes à choix multiples et les sondages
Sur une problématique donnée, il vous suffit, par exemple, d’un premier questionnaire pour faire émerger des pistes de solutions, puis de les faire prioriser par un sondage. Cela ne prend que quelques minutes à chaque personne !
Vous aurez en plus une idée de l’acceptabilité des pistes de solutions.
– Les décisions algorithmiques
Limité à des décisions mesurables, ce mode de décision est d’une efficacité incomparable.
Après un temps d’échange, un algorithme est défini (cela peut être une simple formule mathématique comme une moyenne). Chacun·e donne sa réponse. Elles sont traitées par l’algorithme qui donne la décision.
Vers un renouveau démocratique ?
Cet article est un appel à ne pas nous laisser déposséder de notre pouvoir de décision.
Créer un système politique qui mette en œuvre cette intelligence collective pour les décisions politiques serait une voie alternative (potentiellement complémentaire) aux IA, l’occasion d’un renouveau démocratique.
Les conventions citoyennes pourraient en être le balbutiement, de même que remplacer le vote à la majorité par des systèmes de vote plus vertueux.
J’espère que cette article aura éveillé votre intérêt pour le potentiel de l’intelligence collective, tant pour décider dans nos organisations, que pour revitaliser nos démocraties.
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Article rédigé par Sacha Epp
Après avoir s’être formé et avoir expérimenté de nombreux modèles de gouvernance, Sacha Epp a initié la Gouvernance Intégrative en 2020.
Il partage son temps entre ses activités de formateur, d’accompagnant et son travail de recherche dont il partage une partie dans ces articles.